Le quatre-mains ou l’art du partage
La recette d’Un Été en France ? Une tournée, des rencontres, des émotions à transmettre… et parfois aussi, une aventure de très grande proximité. Pour Stella Almondo et Yiheng Wang, pianistes, cela commence à deux sur un même banc, celui d’un piano pour un quatre-mains. Un exercice à la fois exigeant et intime, où la confiance devient un pilier aussi important que la technique.

De gauche à droite : Stella Almondo et Yiheng Wang
Ils ne se connaissaient pas avant le début de la tournée, mais très vite, une dynamique commune s’est installée. « Je suis plus habituée à jouer seule », confie Stella, 19 ans à peine, étudiante en licence au Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris, « mais je n’étais pas inquiète, la musique est au centre et la partition a toujours raison. » Pour elle, le duo fonctionne si l’on accepte de lâcher prise : « Je ne vais pas vérifier ce qu’il fait. La musique doit couler sous les doigts. »
Une alchimie sensible
Né en Chine, Yiheng, 28 ans, est en résidence à la Chapelle Musicale Reine Élisabeth en Belgique. Il est plus expérimenté dans l’exercice du duo. C’est lui qui assurera la partie grave et la pédale dans leur « quatre-mains ». « Jouer en duo, c’est proposer, écouter, parfois bousculer. Et quand l’autre répond, que ça fuse, ça crée une ambiance unique pour le public. »
Cette harmonie sera au cœur du programme que les deux musiciens proposeront en première partie du concert de Gautier Capuçon, à L’Isle-Adam (4 juillet), à Caudry (5 juillet) puis à Trancrainville (11 juillet). Ils interprèteront deux grandes pages pour quatre mains de Brahms et Dvořák, puis une pièce à six mains de Rachmaninov avec un partenaire surprise. Chacun jouera également une pièce en solo : Yiheng a choisi une variation de Tchaïkovski opus 19 n°6, tandis que Stella défendra une œuvre flamboyante et virtuose : la Mephisto Valse de Liszt.
Une inspiration familiale
Le chemin qui les mène sur scène passe aussi par des histoires de famille. Stella, a 14 ans quand elle rencontre pour la première fois Gautier Capuçon, lors de l’émission Prodiges, et lui doit l’un de ses tout premiers récitals. « Il m’a proposé de jouer une sonate au festival des Heures Musicales de Biot. J’avais 16 ans. On a choisi Grieg, c’était merveilleux. Depuis, je suivais Un Été en France sur les réseaux, et cette année j’ai enfin eu l’âge de passer le casting ! »
Elle ne manque pas de gratitude pour le soutien indéfectible de sa mère : « C’est mon vrai duo. Sans elle, je n’aurais jamais pu faire tous ces voyages, ces concours. » Yiheng, lui, rend hommage à son père, chef cuisinier. « En Chine, apprendre la musique, c’est très strict. Mon père travaille beaucoup. Moi aussi et je cuisine aussi, surtout depuis que je suis arrivé en France, il y a dix ans. Souvent je pense à la cuisine quand je joue ! »
Cuisine musicale
Ce parallèle entre art culinaire et interprétation musicale l’inspire jusque dans sa façon de penser le morceau de Tchaïkovski qu’il jouera. « Comme un menu. On commence frais, léger, comme une crème de concombre au citron vert. Puis vient un plat dense, en fortissimo. Et on finit sur un dessert très sucré, en fa majeur. Quelque chose de spectaculaire. »
Stella, elle, parle de la scène avec passion : « Être sur scène est plus qu’un bonheur, c’est une raison de vivre. Jouer la musique au quotidien est une bulle magique, mais sans la scène je serais frustrée. J’ai besoin de ce contact avec les gens, de ce partage. Pouvoir toucher les autres est un pouvoir presque sacré. »
Ce « quatre-mains », comme toute la tournée Un Été en France, est donc bien plus qu’un exercice de style. C’est un lieu de dialogue, une école de l’écoute, une belle leçon de vivre ensemble. Sur un seul clavier, deux artistes, deux histoires, deux sensibilités, et un même désir : faire vibrer le public, à l’unisson.